Nos sociétés modernes rompent le fil naturel qui reliait l’homme à son environnement encore jusqu’au siècle dernier. Les villes et bientôt les espaces virtuels sont mieux connus que les près, les forêts, les océans et les cimes. Perdu en pleine nature, on aura du mal à s’orienter, pour ne rien dire de la survie. Alors que perdu dans le métro, il semble naturel de retrouver son chemin. Mais il n’en est rien.

Ce fil rompu, c’est celui qui tenait l’homme près de la terre, et qui l’autorisait à regarder au dessus de lui l’infini en pleine confiance, conscient de sa finitude mais reconnaissant à l’invisible pour le temps présent.

Or de nos jours tout s’accélère.

Comme déréalisé, un homme moderne semble souffrir d’anxiété chronique, et d’abus de stress. Ce déplacement produit une perte de confiance dans le monde qui l’entoure, et un repli sur soi sécuritaire qui n’est pourtant d’aucun secours.

Pour aller plus loin, de mauvaises décisions globales sont parfois prises au nom du sacro saint droit à une existence individuelle. C’est le droit au chacun pour soi, avec le lot d’angoisse et d’anxiété qui accompagnent l’isolement pour un être social et fragile.

Considérons pour nous divertir et pour la démonstration en même temps le dilemme de deux amis: l’un d’eux est coupable d’un délit mineur dont l’autre est innocent. Les deux sont pourtant capturés et on leur laisse le choix du marché. Soit 1- nul ne dénonce l’autre et ils sortiront chacun libre. Soit 2-l’un dénonce et sera libre tandis que l’autre fera de la prison. Soit 3-les deux se dénoncent et chacun sera tenu de régler une amende mineure. Puis les deux amis sont isolés sans possibilité de communiquer entre eux.

Bien  sûr la solution la plus avantageuse pour les deux sera la première. Mais rendus anxieux et effrayés par la sentence encourue si l’un des deux parlait, c’est à dire si l’autre avait plus peur encore, le choix retenu sera finalement celui de la troisième possibilité, qui installe leur relation dans une sorte de désespoir tranquille. Et à chaque décision, c’est ainsi que nous sombrons très doucement dans une sorte de dépression collective douce, molle et consentie.

Il faut donc pour véritable remède commencer par rétablir la confiance et l’espoir, en chacun, en soi même, en l’autre, en son médecin, en son histoire. Car l’histoire peut être belle, et il ne tient qu’à chacun d’être son propre médecin en chaque situation et d’apprendre à surmonter les épreuves.

Pour guérir en quelque sorte, il faut au moins vouloir s’aider à guérir.

Accepter sa maladie, la cerner, c’est cela aussi la traiter. Prendre les mesures qui s’imposent en toute connaissance de cause peut véritablement prévenir de son évolution péjorative sur le long terme.